Les œuvres de Didier Figent puisent leur principe dans un arrangement de l’artiste avec la nature. Toutes. Même les plus modestes, ses objets utilitaire en terre cuite.
Mais les oeuvres qui directement trouvent leur raison d’être dans la conscience que l’artiste a de la nature sont ses sculptures.
Dans la série intitulée « Hommage au règne animal et végétal » nous croyons voir des curieux trophées. Deux matériaux différents : la corne brute de cervidé ou bovidé et la forme façonnée par la main de l’artiste dans le grès. Associés, ils sont déposés sur un socle en bois.
Comme la célèbre « Tête de taureau »de 1942 réalisée par Picasso au moyen d’une selle et d’un guidon de vélo. Comme au milieu du 16ème siècle, le peintre maniériste Giuseppe Arcimboldo assemble des fruits pour réaliser des portraits. Détourner des objets trouvés pour créer une image poétique, c’est une technique, c’est du langage artistique.
Seulement les assemblages réalisés par Didier Figent se situent en marge d’une telle esthétique purement formelle. Elles provoquent chez le spectateur un sentiment différent. Une sorte d’étrangeté trouble l’imagination comme à la vue d’un menhir au détour d’une promenade en forêt. Investi d’une fonction extra- artistique, l’objet n’est plus un pur paraître destiné à émouvoir, à épater comme une œuvre d’art profane… Il devient une quête, point d’interrogation d’ordre moral, un vœu, une présence totémique.
Par-delà les explications de la science, l’artiste capte les messages de la nature. Il les reçoit mystérieux, justes, efficaces….
Pour le scientifique, le Cosmos est un matériau. Pour le poète une source de contemplation, pour Didier Figent le sentiment cosmique appartient à sa propre histoire.
Sa personnalité n’obéit pas seulement aux exigences du métier de sculpteur, mais à l’inconscient « culturel » dont elle est issue. Mystiques, ésotériques, d’autres forces la traversent. Le sculpteur dit ouvertement que quelque chose travaille à sa place. Il n’est qu’un passeur.
Sa conscience est ouverture au monde. Son expérience intime avec les éléments naturels il la vit en tant que don. Comme possédé par des forces extérieures il travaille à partir du mois de janvier jusqu’au mois de mars avec une incroyable énergie. Il se laisse faire. Sa sculpture murmure une litanie chamanique.
Dans cette autre série : « Hommage au règne minéral » aussi.
Les objets sont constitués des facettes s’imbriquant les unes dans les autres. Comme leur nom l’indique, ce sont des Cristaux. La pièce intitulée « Cristal de terre nr. 2 » paraît particulièrement suggestive. À l’image d’un papier écrasé entre les mains, elle garde la mémoire de l’énergie de celui qui l’a comprimée.
L’originalité de l’art de Didier Figent prend place dans un entre deux, entre chien et loup.
Ileana Cornea