RAPHAEL – La belle jardinière
Une vierge à l’enfant peinte par l’un des plus grands peintres italien de la Renaissance, contemporain de Léonard de Vinci et Michel Ange: Raphaël.
Marion Kling vous propose ici de découvrir ce tableau : « La belle jardinière », exposé au musée du Louvre.
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Texte intégral du commentaire, par Marion Kling :
Raphaël, « La belle jardinière »
« La Belle jardinière », que vous avez sous les yeux, est sans nul doute l’une des plus belles madones florentines de Raphaël. Il s’agit d’une huile sur bois datée de 1507, qu’abrite la Grande Galerie du musée du Louvre, à Paris.
Peintre et architecte italien originaire de la province d’Urbino, Raphaël est contemporain de Léonard de Vinci et de Michel-Ange.
Leur époque ? Celle de la Renaissance, d’une exceptionnelle floraison artistique, littéraire et scientifique. En rupture avec le Moyen-Age imputé aux barbares, la Renaissance artistique se tourne vers l’Antiquité, modèle de perfection, d’équilibre et de rigueur.
Les artistes souhaitent rivaliser avec les plus grandes œuvres du passé. Ils se nourrissent pour cela de traités scientifiques et architecturaux, dessinent d’après nature et étudient les proportions de la statuaire grecque ; la technique de la peinture à l’huile se perfectionne et l’art du portrait connait un nouvel essor.
Mais revenons à Raphaël : son existence se résume à 37 années, mais il exerce durant une période de plénitude artistique, l’Age d’Or de la Renaissance dite « classique », entre 1480 et 1520.
Elève du Pérugin, c’est à Florence que Raphaël reçoit l’influence la plus déterminante pour sa peinture, celle de Léonard de Vinci. Durant ce séjour florentin, de 1504 à 1508, Raphaël entreprend de multiples recherches sur le thème de la Vierge à l’enfant avec Saint Jean Baptiste dans un paysage. « La Belle jardinière » en est certainement l’aboutissement le plus réussi.
Le titre vous interpelle ? Rien de plus normal, il est en effet surprenant. Il est choisi au 18e siècle en raison de l’habit modeste de la Vierge, vue en paysanne dans un pré fleuri. Signé et daté par Raphaël, le tableau, acheté à Sienne pour le compte de François Ier, acquiert une popularité immédiate.
Regardez attentivement les personnages. La Vierge et l’Enfant Jésus sont représentés avec saint Jean-Baptiste sur fond de paysage bucolique. Jésus s’efforce de saisir la Bible qui préfigure l’annonce de son supplice. Sa mère le retient dans un léger élan de tendresse, tandis que Jean-Baptiste se relève pour lui remettre la croix du sacrifice.
Les regards dirigés vers l’enfant Jésus soulignent l’intimité de cette scène et le lien de complicité qui unit la mère et son fils. La cohésion entre les figures se lit aussi dans le choix d’une structure pyramidale. Inspiré des études de Léonard De Vinci, ce type de composition en triangle donne au groupe une assise monumentale et en accentue la stabilité. On peut également y voir une allusion à la Trinité divine.
Observez désormais la nature qui entoure les protagonistes, et avec laquelle ils semblent en parfaite osmose. Le paysage s’étend paisiblement de part et d’autre de la Vierge, formant un axe vertical. Le ciel serein et limpide est à peine traversé de quelques nuages. Des collines se dessinent faiblement dans le lointain, tandis qu’au premier plan apparait plus précisément le pré fleuri, parsemé d’ancolies (évoquant la Passion du Christ), et de violettes (symbolisant l’humilité de la Vierge).
Le style de Raphaël se traduit dans la recherche d’un équilibre idéal, d’une homogénéité parfaite, d’une fluidité toute naturelle dans les mouvements, les postures et les gestes. Vous voici devant un moment de grâce, d’innocence et de félicité, excluant toute forme d’expression dramatique.
Cette harmonie particulière renvoie aux toiles du Pérugin, le maître de Raphaël. Laissez-vous baigner par la lumière diffuse, modelant les corps avec délicatesse ; imprégnez-vous de ces couleurs tendres et unifiées ; admirez la noblesse des figures et la mesure de leurs gestes ; appréciez leur souplesse et leur beauté juvénile, le visage de la Vierge, aux traits fins et gracieux, les chevelures duveteuses et les carnations diaphanes.
Plongez enfin dans l’horizon infini de ce paysage mystérieux et poétique, inspiré par les recherches de Léonard de Vinci sur la perspective aérienne et atmosphérique. Dans une touche parfaitement lisse, les contours s’estompent vers le fond grâce à la technique du sfumato, mise au point par De Vinci : cette technique, consistant à flouter les traits, donne au motif la sensation d’un fondu vaporeux ; les couleurs bleuissent et se diluent dans le lointain, contribuant au caractère onirique du décor.
Malgré un ensemble d’une grande douceur, la puissance expressive de Michel-Ange, dont se nourrit également Raphaël, intervient dans le traitement vigoureux des drapés et dans le modelé de l’Enfant Jésus.
Emblématique de la Renaissance classique et de la période florentine, « La Belle jardinière » parvient à une synthèse singulière et dévoile un sens très naturel de la narration, ainsi qu’une exceptionnelle maîtrise de la composition. D’une apparente simplicité descriptive, elle s’avère en réalité symbolique et renferme de subtiles énigmes.
Raphaël a inspiré un grand nombre d’artistes. Eugène Delacroix déclare au 19e siècle que « son esprit répand partout avec la vie et le mouvement, l’ordre le plus parfait et une harmonie enchanteresse. »
Le créateur de « La Belle jardinière » demeure, aujourd’hui encore, considéré comme le maître absolu du classicisme et de l’équilibre en peinture.
Marion Kling